Synagogue de Boukhara
Une histoire ancienne
Le terme "Juif de Boukhara" est en réalité utilisé pour désigner les populations juives d’Asie centrale dans leur ensemble du fait de leurs concentrations importantes dans la ville de Boukhara en Ouzbékistan. Pour comprendre l’établissement d’une communauté juive dans la région, il faut remonter à la prise du Royaume de Juda par Nabuchodonosor II, roi de Babylone, en 597 avant J.-C. Ce dirigeant babylonien décide donc d’exiler la population majoritairement juive à travers son royaume afin d’appuyer son pouvoir sur cette terre nouvellement conquise.
En 539 av. J.-C, l’empereur perse Cyrus II conquit à son tour le royaume de Babylone, faisant de la Judée une province perse également. Cyrus II autorise également les juifs à retourner sur leur terre, mais encourage certains à s’établir ailleurs dans l’Empire perse, dont l’actuel territoire d’Ouzbékistan fait partie. Ainsi commence leur histoire.
Personnages importants de la communauté juive de Boukhara
Mariage juif à Bukhara entre Barukh à gauche et Khanna à droite en 1870. Source: Library of Congress Prints and Photographs Division, Washington
Une culture unique
Dus à l’éloignement prolongé du reste de la diaspora, les juifs de Boukhara développent des rites, une langue et même une cuisine particulière, inspirés des spécialités locales, mais adaptés à leurs contraintes religieuses. Un des plats iconiques est le mai birion ovi sir, poisson à l’ail que tous les juifs de Boukhara mange le soir du Shabbat
Leur musique connue sous le nom de shashmaqam est particulièrement intéressante par ses influences hétérogènes avec des rythmes centre-asiatiques, des mélodies issues de la musique arabe, klezmer et indienne dont les paroles sont inspirées d’écrit Sufi. Ils chantent dans leur langue, le Bukhari, dialecte de langue tadjike avec des apports de l’hébreu.
Danse traditionnel juive d'asie centrale. Source: Zoltan Kluger - National Photo Collection of Israel, D827-056
La route de la soie, une renaissance pour cette communauté
Les Juifs de Boukhara font l’objet d’influx de populations du reste de l’Asie centrale avec l’émergence de la route de la soie au XIIIème siècle, mais également d’Afghanistan, du Yémen ou encore du Maghreb. Reconnectés au reste de la diaspora, c’est une ère de prospérité pour cette communauté qui s’enrichit notamment grâce à des contacts bien établis dans le commerce international. Avec le déclin de cette route commerciale et l’établissement du Khanat de Boukhara au début du XVIème siècle, la tolérance religieuse se dégrade et les juifs doivent payer des taxes, s’habiller différemment et vivre dans un quartier délimité. Les « Chalas » font alors leur apparition, des juifs qui se convertissent à l’islam pour échapper aux discriminations tout en pratiquant secrètement le Judaïsme à l’image des Juifs Marannes d’Espagne en apparence catholique.
Synagogue de Bukhara
Un judaïsme païen?
Paradoxalement, la première synagogue officiellement recensée est construite en 1620. Les juifs officiaient auparavant dans la mosquée, auprès des musulmans. L’isolement, l’absence d’institution religieuse et les diverses influences locales avaient empreint leurs rites d’influence musulmane, zoroastrienne et perse. Un Rabbin Marocain Yoseph Ben Moshe Maimon en visite à Boukhara s’émeut de leurs conditions de vie difficile et s’installera sur place (Pinkhasov, Ochilʹdiev & Kalontarov, 2007). Il devient vite un chef religieux important et les amènera à pratiquer le judaïsme selon les rites sépharades, toujours en usage aujourd’hui.
Réunion entre un Imam, un prêtre orthodoxe et un rabbin à Boukhara. Source: galerie photographique de Boukhara.
Invasion Russe, tournant soviétique
En 1868, le Khanat de Boukhara est envahi par les troupes impériales russes et devient un protectorat. Bien que l’antisémitisme soit omniprésent en Russie à cette époque, l’administration russe est cependant moins contraignante que celle du Khanat et amène un influx de populations juives ashkénaze de Russie. La domination russe signe donc un renouveau pour cette communauté, qui brille dans les domaines de l’art, du commerce, mais également du sport. En 1920, peut après la révolution bolchévique, la région devient une république rattachée à l’URSS. Beaucoup fuit par l’Afghanistan à l’approche de l’armé rouge et ceux qui reste ce voit interdit de pratiquer leur religion. Avec la fermeture des frontières, les juifs de Boukhara redeviennent la communauté la plus isolée au monde.
Intérieur de la synagogue de Boukhara
Vers une diaspora mondiale
Avec la chute de l’URSS, ils vont presque dans leur intégralité migrée massivement : aujourd’hui environ 70.000 vivent aux États-Unis, 100.000 en Israël et 10.000 dans le reste du monde. En Amérique, ils s’installent presque tous à New York dans le Queens, plus précisément à Forest Hill parfois surnommé « Bukharlem », où aujourd’hui encore des restaurants et magasins proposent des produits typiques de leur communauté d’origine. Aujourd’hui il ne reste que quelques milliers de juifs de Boukhara en Asie centrale, et environ une centaine à Boukhara.
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